Ca ne prendra qu'un instant [Terminé]

Louison n'eut pas le temps de répondre à Félixine qu'on entraîna la dryade derrière le paravant. Celle ci tenta aussitôt de se débattre. Aussi étonnant que cela puisse paraître, elle était bel et bien pudique. Si elle pouvait se montrer en tenue débraillée dans la rue, il était en revanche hors de question que l'on appercoive un seul de ses mamelons.

Alors quand les domestiques baissèrent le haut de sa robe, Louison tenta de se débattre de plus belle, tout en couvrant sa poitrine d'une main. Mais cela n'empêcha pas les domestiques d'atteindre leur but. Louison était blessée, tentait de se cacher : sa résistance était bien moindre qu'avec les gardes quelques jours auparavant. On lui passa la pièce de tissu sur le ventre, et on commença à lui serrer dans le dos. À trop le serrer.

Louison, encore en colère de sa mise à nu forcée, ne put empêcher un réflexe quasi animal de l'envahir. En un mouvement de tête, elle donna un violent coup de bois à celle qui serrait le vêtement. Profitant de la stupeur de celle-ci, la dryade recula maladroitement vers un angle de la pièce, tout en montrant ses bois à quiconque voulait l'approcher.

"Partez ! Et ne refaites plus jamais ça."

Un mélange de colère et d'humiliation perçait dans sa voix.

Félixine se massa les tempes en soupirant. 

"Un corset ne peut pas se mettre seule. Et il est obligatoire que vous en ayez un. Je suis navrée. Même moi, je suis obligée d'en avoir un... Et cela est une habitude à prendre."

Félixine s'approcha d'elle des deux pas

Alors que les domestiques se tenaient maintenant à distance de la dryade -qui venait de blesser une de leur collègue-, Félixine, elle, prit le risque de s'approcher. Risque qui paya, car Louison ne la menaça pas de l'embrocher d'un coup de bois. En même temps, l'élémentaire savait qu'elle lui était redevable de sa vie, et elle pouvait bien faire un petit effort, malgré la colère qui bouillonnait en elle. Pour tout de même tenir la noble à distance, elle grogna un "Non", qu'elle accompagna d'un geste de la tête.

Sa posture, défensive, rappelait son côté sauvage. D'autant plus qu'elle avait toujours la robe baissée au niveau de la taille, dévoilant le corset tout juste serré qu'on avait tenté de lui faire enfiler.

"C'est hors de question. Personne ne m'aidera à m'habiller. Soit je ne le mets pas et je m'habille seule, soit, si vraiment vous souhaitez que l'on me voit nue, je ne mettrais que ça. Après tout, que ce soit deux personnes ou tout le palais qui me voient ainsi, c'est pour moi la même chose."

Pas tout à fait en réalité. Elle serait bien évidemment capable de se présenter devant toute la cour en simple corset : pour elle, cela cachait suffisamment son intimité, et cela ne lui poserait pas de soucis d'ôter les robes au dessus. Par contre, elle avait bien compris que ça devait être quelque chose d'assez discret dans les usages ; sinon, elle aurait sûrement déjà vu des nobles se promener en dessous. En plus de cela, elle se souvenait que le barbare avait tenté de la couvrir après l'avoir fait arrêtée, ce qui montrait une pudeur plus importante que la sienne.

Elle était donc persuadée que Félixine ne pourrait pas accepter que sa demoiselle de compagnie l'accompagne en une tenue aussi simple et révélatrice.

Le visage de Félixine palît un peu car la princesse ne doutait que la dryade était capable de mettre ses menaces à exécution.

"Allons allons... Ne nous énervons pas. Si vous ne portez pas de corset, vous mettrez quand même les robes?"

Félixine était-elle réellement en train de négocier avec Lousion? En quelque sorte, oui. Bon, le corset, Félixine s'en fichait mais c'était dans les usages de la cours et la grande majorité des femmes en portaient. On remarquait immédiatement celles qui n'en portaient pas. Le corset faisait partie intégrante des vêtements qu'on portait ici.

Même si Louison restait toujours sur la défensive, elle se détendit un peu. On ne recommencerait pas à la déshabiller de force. La dryade hocha la tête.

"Tant que ça reste des robes simples, oui."

Par simple, elle entendait des robes qu'elle pourrait mettre seule, mais aussi sans trop de fanfreluches. Quoi qu'en dise Félixine, la robe que Louison avait déjà essayé lui semblait déjà bien peu pratique, alors elle n'imaginait pas porter quelque chose de plus complexe.

Elle baissa les yeux un instant vers la tenue qui était descendue au niveau de sa taille, et du corset qui lui serrait toujours la poitrine. Il était temps que la jeune femme se rhabille. Louison redressa la tête et dévisagea chacune des personnes dans la pièce, mettant au défi quiconque de la suivre, y compris la noble. Une fois sûre qu'on la laisserait en paix, elle se dirigea, toujours en boitant, vers l'arrière du paravent.

Louison tenta de le rapprocher un peu plus d'elle, toujours méfiante, mais elle n'avait pas vraiment les appuis pour. Alors, après l'avoir fait bouger d'un demi centimètre, elle abandonna, et se décida à se changer. Si elle prit soin d'enlever la robe sans trop l'abîmer, le corset lui, fut arraché. La dryade déchira au passage les lacets qui le maintenaient. Elle remit ensuite la sorte de chemise de nuit blanche qu'elle portait à l'arrivée de Félixine, et sortit de son abri, tout en gardant un air sévère au visage. Cette fois, son changement de tenue avait été bien plus rapide.

Simple... simple... Qu'entendait Louison par simple? Robe simple ne sonnait pas pareil dans les têtes des deux jeunes femmes. Félixine tenta se de mettre à la place de la dryade. La robe verte que venait d'essayer Louison était visiblement considérée par cette dernière comme simple mais à la limite du supportable. 

La princesse s'appliqua à sélectionner d'autres modèles dans les couleurs de la forêt qu'elle jugeait assez simple pour que Louison puisse les mettre seules. Elle en sélectionna une dizaine.

"Essayez-les et après, je vous laisserais avec cette histoire de robe et nous passerons à la suite."

Louison acquiesça, et s'empara de la petite pile de robe que lui tendait Félixine. D'un côté, elle se disait que c'était beaucoup trop pour elle, mais de l'autre, au vu de toutes les tenues qui avaient été amenés, cela ne faisait presque rien. Elle se demanda, durant un court instant, ce qui serait fait du reste, avant de se rappeler que ce n'était pas son problème. Elle avait des robes à essayer.

Elle retourna donc derrière le paravent, et essaya tour à tour les différentes robes. A chaque fois, elle prenait bien le temps de les observer, de les essayer et de juger leur aspect avant de venir montrer le résultat à la noble. Pour la plupart, les robes lui allaient, même si elles ne correspondaient pas vraiment à l'idée que la dryade se faisait de tenues. Mais elle n'avait pas vraiment le choix. Elle imaginait mal Félixine lui tendre une tunique avec laquelle elle pourrait courir et grimper aux arbres.

Alors malgré les ornements inutiles et les jupons trop imposants, Louison acquiesçait silencieusement pour chacune des tenues qu'elle essayait. Elle pouvait faire des efforts, même si cela lui coutait. Au moins, elle restait indépendante.

Félixine était très contente des essayages de Louison car, quasiment toutes les robes lui allaient à ravir. Il était fort dommage que la dryade n'ait pas un caractère plus docile. 

"Bien, nous avons vos robes. Elles vont, pour le moment, constituer votre garde robe. Vous devrez les mettre lorsque vous serez avec moi."

La princesse donna l'ordre que le reste des robes soient enlevées de la chambre de Louison. 

"Vous n'êtes pas trop fatiguée ? "demanda Félixine qui n'oubliait pas la blessure de la dryade. 

Une fois supplémentaire, Louison hocha la tête. Les mettre en présence de Félixine, c'était faisable. Surtout que ça lui laissait libre choix de sa tenue pour quand elle irait en forêt. Il faudrait que de son côté, elle retrouve une tenue pour cela, sa tunique étant en lambeaux, et les robes pas du tout adaptées. Dès qu'elle se sentirait un peu mieux, elle irait.

Louison se dirigea vers la chaise alors que les domestiques commencèrent à ôter les tenues de la chambre. Et Félixine reprit sur un autre sujet en s'enquérant de l'état de la dryade.

"Si. Mais c'était déjà le cas quand vous êtes arrivée. Alors continuez."

C'était toujours dur lorsqu'elle devait se déplacer, même si sa canne improvisée l'aidait grandement. Mais il était évident que le lendemain, elle aurait mal partout. Ainsi soit-il, Louison ferait face. Elle était tenace.

Félixine ignora délibérément le reproche de Louison. Elle sourit.

"Bon, je voulais vous faire visiter le château aujourd'hui mais je pense que vous tomberai de fatigue avant même qu'on en fasse la moitié."

Elle n'avait pas envie que sa nouvelle dame de compagnie commence à faire des malaise dans les couloirs et que des rumeurs commencent à se propager du style que Félixine ne prenait pas soin de son personnel.

Alors que la princesse allait laisser la dryade se reposer, un serviteur annonça l'arrivée du prince Batiste. Le pauvre serviteur n'eut pas le temps de terminer totalement son annonce et que le prince était déjà dans la chambre de Louison, furieux.

"Oh! Mon cher frère ! ronronna Félixine. Comment vas-tu?

Sans même s'intéresser à Louison, Batiste fonça sur sa soeur, la menaçant de sa carrure.

-Toi!! Tu contestes mes décision à présent?!