Un chasseur sachant chasser ... [Terminé]

Il n'avait pas l'air de réagir aux autres chasseurs attachés par les plantes. Cela n'arrangeait vraiment les affaires de Louison. Peut-être qu'elle devrait faire pousser des tiges autour de ses jambes à lui aussi ... En même temps, pour négocier leur départ, ça n'était pas la meilleure idée. Elle allait attendre encore un peu.

"Un humain, qui ternit la beauté de la forêt. Un cavalier, qui laisse les sabots de ses chevaux arracher de nombreuses touffes d'herbes sans aucune raison. Et un chasseur, qui en se frayant un passage entre les arbres, casse les branches, et qui en tirant perd des balles dans le tronc des arbres et dans les ressources de la terre."

Et qui allait sûrement en faire plus s'il revenait. La dryade avait passé tant d'années à vivre dans ses bois, et à s'en occuper comme si c'était sa famille qu'elle ne pouvait pas supporté cette idée. Bien sûr, elle ne pouvait rien faire maintenant, mais si elle réussissait à les dissuader de revenir, elle aurait beaucoup gagné.

"Alors partez, avant de lui faire plus de mal."

Batiste la toisa en la prenant de haut. 

"Ce sont tous des nobles ainsi que moi-même. Je suis le prince héritier Batiste Kingsland. Vos menaces me m'effraient pas. Si je le décide, je peux faire rayer cette forêt de la carte d'Alqualis."

Voilà qui devrait lui mettre un petit coup de pression à cette dryade prétentieuse. Le prince héritier n'allait sûrement pas céder face à elle. C'était hors de question. Et puis, à quoi rimait cette dispute? Quels étaient les aboutissement? 

La colère s'insinua lentement en Louison. Raser toute la forêt ? Quel être doté d'une conscience pouvait faire ça ? C'était inhumain ! La dryade ne pouvait pas le laisser dire cela, qu'importe qu'il soit noble ou prince.

Mais il fallait qu'elle contienne sa colère. Elle ne pouvait pas agir stupidement, ou sinon, elle risquait de ne pas atteindre son but, c'est à dire protéger cette forêt de tout ce qui pouvait la mettre en danger.

Louison resta donc calme en apparence. Elle s'approcha doucement des nobles, et prit une partie de nourriture, qu'elle mangea, de façon toujours sereine.

"Et bien, allez-y votre seigneurie."

Elle parlait d'un ton pompeux, alors qu'en réalité, elle ne savait pas grand chose de la noblesse. Mais tant qu'elle arrivait à jouer le jeu, cela fonctionnerait probablement.

"Mais dites-moi, que ferez-vous une fois cette forêt rasée ? Vous raserez la suivante ? Cela risquerait d'être fâcheux. Surtout qu'aux dernières nouvelles, je ne suis pas la seule vivant en ces lieux. Il y a sûrement d'autres dryades, des lycans, et quelques hybrides je crois. Comment gérerez-vous leur colère ?"

Elle reprit une bouchée. Au fond elle, la dryade bouillonnait de colère. Elle voulait qu'ils partent, pour protéger sa forêt, et lui en représailles, menaçait de tout couper ? Finalement, elle était heureuse que ces ancêtres se soient exilés du monde. Sinon, elle aurait du supporter une autorité comme celle de ce prince héritier.

Si Batiste ne supportait pas quelque chose, c'était bien qu'on lui manque de respect. Au départ, le prince avait pensé que la dryade s'était calmée mais ce ne fut pas du tout le cas. Le prince la regarda sévèrement. Elle osait lui répondre? 

Avec une vitesse fulgurante, la claque que le prince infligea à la jeune femme fut fulgurante. On ne frappait pas une femme? Tant pis pour la galanterie, cette sauvageonne ne le méritait pas. Elle n'avait pas répondre au futur roi d' Alqualis. 

"Emmenez-la avec nous." ordonna-t-il à ses amis. 

C'est alors que le prince remarqua qu'ils avaient les pieds liés par des branches. Il sortit son épée et coupa ces dernières sans états d'âmes. 

Louison se mordit la joue. C'était qu'il avait de la poigne le chasseur. Mais pas question de laisser les choses s'empirer. Aussitôt, elle se redressa et bondit vers l'arrière. Elle eu raison, au vu de l'ordre qu'il donna à ses sous-fifres. Grâce aux plantes, cependant, elle pourrait avoir le temps de s'éloigner pour leur échapper, et de réfléchir à un moyen de réussir à les faire partir.

Malheureusement pour elle, le prince fut réactif. Il trancha tour à tour chacune des tiges, alors que la dryade tentait de s'échapper. A chaque coup, elle avait l'impression que c'était elle qu'on frappait. Elle gardait tout de même un peu de force, parce que les plantes étaient seulement blessées, et non pas tuées.

Elle continua à s'éloigner, avant de grimper dans un arbre. De là haut, Louison pourrait peut être retrouver l'avantage. De plus, grâce aux blessures qu'avait infligé le jeune homme aux autres nobles en coupant leur lien bien trop serrés, elle en avait eu le temps. Une fois arrivée en haut, elle se déplaça discrètement de branches en branches vers un autre arbre. Il fallait qu'elle arrive à dissimuler sa position. 

Mais Louison souffrait aussi en silence. De par l'humiliation de la claque, mais aussi pour ses branches tranchées. Cette fois, il n'était plus uniquement question de protéger la forêt. Il fallait qu'elle sauve son honneur de dryade.

De l'arbre où elle était, elle se pencha, puis attrapa trois cadavres d'oiseaux. Elle alla ensuite rapidement sur un autre arbre, et encore un autre.

Quand le prince se retourna, encore fou de colère, il ne vit plus plus personne. La sauvageonne s'était fait la malle! Génial! Il avait prévu de la capturer et de la ramener avec eux pour lui apprendre la politesse au fond d'un donjon. Mais ce plan tombait à l'eau si la prisonnière n'était plus là. Voilà qui était fâcheux.

"Retrouvez-la!" aboya le prince aux nobles qui étaient avec lui.

Ils remontèrent tous sur leurs destriers. Cette fois, ce n'était plus une simple partie de chasse... on était dans une chasse à l'homme. 

Louison passait d'arbre en arbre, mais en restant dans le coin. Quelle fut donc sa surprise lorsqu'elle vit les chasseurs monter à cheval pour aller plus loin. Ce n'était pas très malin. Bon, en soit, ils n'avaient pas vraiment les moyens de savoir que la dryade avait été affaiblie et qu'elle ne pouvait donc vraiment courir partout, ce qui permettait d'excuser ce manque de logique. 

La jeune femme s'arrêta alors. Au fond d'elle sa conscience lui disait d'arrêter là. Les laisser chercher pendant des heures serait une bonne compensation, et elle, pendant ce temps, pouvait entrer en communion avec l'arbre sur lequel elle se trouvait. Ainsi, elle serait invisible aux yeux des nobles, et elle pourrait se régénérer. Le problème à cela, c'est qu'elle ne pourrait alors pas les empêcher de revenir, et surtout, que même si elle était protéger car fondue dans l'arbre, il y avait encore le risque que le prince mette sa menace à exécution. Et qui savait ce qui arriverait à la dryade si l'arbre avec lequel elle communiait était coupé ?

Louison ne fit finalement rien, et resta perchée dans les hautes branches de l'arbre, en observant les chasseurs qui se trouvaient encore à portée de vue, et surtout, en réfléchissant à ce qu'elle devrait faire par la suite. 

Les nobles avaient beau chercher, ils ne trouvaient rien. Au bout d'une quinzaine de minutes, ils se retrouvèrent à leur point de départ. Le prince était contrarié. 

"Cette sale sauvageonne nous a échappé", grinça-t-il entre ses dents.

Ne voulant pas passer la fin de sa journée à être mécontent, il ordonna qu'ils reprennent leur partie de chasse. 

Les voilà qui revenaient tous, énervés par leurs vaines recherches. Finalement Louison avait bien fait de rester à couvert dans l'arbre. En plus, cela lui avait permit de se reposer un peu. Elle n'avait bien sûr pas retrouvé toute sa force, mais ça, c'était une autre affaire.

Elle ne put pourtant pas se délecter longtemps du bon choix qu'elle avait fait, car se qu'elle craignait se réalisa. Les nobles repartaient à la chasse, sans que rien ne les retienne. Ils auraient pu vouloir au moins rentrer pour soigner leurs pieds ! Enfin, cela laissait le temps à Louison de leur montrer que cela ne valait pas la peine de revenir.

Elle se dirigea vers l'arbre le plus grand du coin. Elle allait d'abord faire fuir les petites proies. Elle se plaça le plus haut possible, en ayant ainsi le haut du corps qui dépassait des feuillages. Elle remua les bras, ce qui lui permit d'effrayer de nombreux oiseaux aux alentours. Et avec l'envol de leur congénères, ceux qui étaient plus loin prirent aussi leur envol.

Il fallait maintenant que la dryade trouve un moyen d'éloigner les animaux terrestres, sans se faire remarquer. Elle redescendit un peu, le sourire aux lèvres. Elle allait protéger la forêt.

Peu de temps après avoir repris leur chasse, Batiste comprit que quelque chose n'allait pas. En effet, les oiseaux s'envolaient tous dans les arbres. Ce n'était pas un comportement normal. Les volatiles ne devraient pas s'enfruir de la sorte. Un mauvais coup de la sauvageonne? Probablement. Mais alors...

Batiste arrêta son destrier, et, en le voyant faire, ses amis firent de même.

"Dans les arbres... Elle est dans un arbre", chuchota le prince. 

Il commença à lever la tête pour observer les arbres.